Lycée Joliot Curie 92000 Nanterre

EAF 2016

1ST2S2

Séquence nº 4: le discours contre la pauvreté de la Renaissance à nos jours

 

Devoir surveillé

Conception: M. Wattremez

 

Question sur corpus nº 1 - corrigé

 

Ce corrigé général est donné à titre indicatif. Il ne remplace pas les annotations sur la copie personnelle de l'élève, ni les conseils prodigués en cours  ou en accompagnement personnalisé.  

Lien vers le sujet

Comment les auteurs des 4 textes essaient-ils de convaincre ou de persuader leur public?

 

Notre corpus regroupe 4 auteurs de textes argumentatifs sur le thème de la pauvreté. Dans l'ordre chronologique nous avons un sermon du XVIIe siècle de Bossuet aux fidèles venus l'écouter à la messe, "La Cigale et la Fourmi", une célèbre fable de La Fontaine à la même époque, avec une morale in absencia (implicite), puis deux articles signés Jaucourt publiés dans l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert (XVIIIe siècle), adressés directement aux lecteurs; enfin un appel radiophonique de l'abbé Pierre aux auditeurs de RTL en février 1954, au moment d'une catastrophe humanitaire due au grand froid. Comment les 4 auteurs essaient-ils de convaincre ou de persuader leur public? [En introduction, brève présentation du corpus, textes, auteurs, époques, situation d'énonciation, problématique]

 

Dans les 4 cas une personne (orateur, écrivain) parle ou écrit pour amener son public (lecteur, auditoire) à partager ses idées (thèse) en utilisant des arguments (explications) et des exemples (cas réels, vus, connus, vécus) à l'appui de la thèse. Bossuet, Jaucourt et l'abbé Pierre s'adressent directement au public (on parle d'argumentation directe), La Fontaine passe par le filtre d'une fiction, avec des personnages animaux, un récit, du discours; on parle d'argumentation indirecte et plus précisément d'apologue. Dans le cas des textes d'argumentation directe on observe la fréquence des apostrophes et des formules d'interpellation pour capter l'attention du public. [Un court paragraphe où nous expliquons clairement les termes que nous employons]

 

Il est intéressant de rapprocher les deux hommes d'église (Bossuet et l'abbé Pierre) dans leur discours contre la pauvreté, même si la stratégie n'est pas vraiment la même. Bossuet fait l'éloge de la pauvreté (éminente dignité des pauvres); il utilise constamment l'argument d'autorité en citant le "docte et éloquent saint Jean Chrysostome" et l'exemple des deux villes riche et pauvre. Il établit une antithèse entre l'opulence et la corruption des riches, qui les conduisent à la ruine, d'un côté, et, d'un autre côté, l'effort et l'abnégation des pauvres, qui les mènent à l'activité et à la prospérité. L'abbé Pierre en 1954 ne se réfère à aucune autorité religieuse. Il le fait une seule fois mais avec humour ("aimons-nous assez tout de suite", c'est une allusion au message d'amour du Christ mais avec le clin d'oeil de "tout de suite"). Au lieu de références religieuses son discours comporte des détails matériels et concrets, des chiffres. Son appel au secours répond à un état d'urgence: il s'agit simplement d'aider les "frères mourant de misère", immédiatement. Le discours argumentatif vise ici non plus à faire méditer comme chez Bossuet mais à agir par des gestes (donner).

 

Jaucourt utilise pour convaincre principalement les nombreux exemples historiques pour illustrer sa thèse, dans un ordre chronologique. Les deux articles "mendiant" et "misérable" permettent par ailleurs à l'encyclopédiste d'établir un distingo entre d'une part le premier, à charge de la société, moralement condamnable, et le second, victime, que la famille et la société doivent défendre et protéger. Le discours se veut neutre et objectif. Il se caractérise par son côté moralisateur et répressif (en laïc Jaucourt ne propose aucune solution religieuse mais la création au niveau de l'État de "maisons de travail"); il fait appel à la réflexion du lecteur par le jeu des questions rhétoriques, qui donne au texte argumentatif un caractère fermé, à la limite péremptoire. Dans le cas de La Fontaine, le poète a recours à la fable et à l'apologie pour défendre une thèse que le lecteur doit deviner, en l'absence d'une morale explicite. Il s'agit donc ici de persuader et non pas de convaincre. Blâme-t-il vraiment l'oisiveté à travers le personnage allégorique de la Cigale et loue-t-il le sens de l'économie de la Fourmi en même temps qu'il suggère son manque de solidarité? Au lecteur d'en juger. Ici le discours semble ouvert. Mais au vu d'autres fables de La Fontaine sur ce thème on peut interpréter plutôt le texte comme un éloge du travail comme le faisait Bossuet, car a priori la fourmi est aussi pauvre que la cigale. Peu importe: c'est surtout par l'humour que se distingue La Fontaine par rapport aux trois autres auteurs sur un sujet aussi grave.

 

Réflexion du prof après avoir écrit ce corrigé et lu les réponses des élèves: 

Et toi, t'estimes-tu pauvre ou riche? Et ta vie á toi, la tienne, tu la vis ou tu la comptes? ... Pas facile de répondre à ces questions, mais intéressant de se les poser, non?

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